Un problème « d’articulation » se pose dans la démarche de l’Inirr entre le besoin de restauration individuelle et le besoin d’une justice équitable ; entre le respect de la personne et le respect des procédures ; entre l’accueil du plaignant et la dignité de l’accusé… entre le temps court et le temps long. Le dossier des « Voix libérées » trouve ici une particularité que le collectif du doute (CDD) a dû faire valoir auprès de sa responsable.
L’inirr cherche à instaurer au sein de l’Église catholique une justice dite « restaurative », en d’autres termes à offrir les moyens d’une « réparation », au-delà de la réponse juridictionnelle, dans le but de rétablir une climat de paix et d’offrir aux personnes concernées un autre statut que celui de « victime ». L’intention est louable.
Mais, dans le cas particulier qui mobilise le collectif du doute, considérant la possibilité pour les « Voix libérées » d’y déposer un dossier, la solution qui consiste à offrir un dédommagement à ces plaignants soulève un problème de droit. Le CDD s’en est donc ouvert dans un courrier à Madame Marie Derain de Vaucresson en lui soumettant une série de questions préoccupantes.
Accueillir un plaignant n’est-il pas une reconnaissance officielle de son statut de victime qui vient déterminer publiquement la culpabilité d’un homme innocent aux yeux de la justice ? Le verdict arbitraire qu’il sous-entend alors viendrait légitimer la violence des attaques publiées dans la presse sur les petits chanteurs de Touraine. Le problème devient alors autant personnel que moral pour les anciens de la manécanterie. Dans ce cas, un soupçon de complicité et le déshonneur retombent sur eux.
Rappelons, qu’en l’état des informations qui sont parvenues au CDD, l’Abbé TARTU conteste formellement les accusations d’abus portées contre lui, qu’une enquête est en cours sous l’autorité du Procureur de la République, mais qu’aucune enquête n’a été menée par les autorités diocésaines.
Par conséquent, comment peut-on assurer que les procédures engagées auprès de l’Inirr et leur aboutissement ne soient pas considérées comme la détermination d’un verdict officialisant la culpabilité du Père TARTU en dehors de tout cadre légal ? Comment s’assurer que leur médiatisation ne sera pas considérée comme une victoire sur les apparentes insuffisances de la justice, la légitimation des dénonciations calomnieuses, de la diffamation comme moyen d’action publique, ou encore, par extension, la normalisation de pratiques antidémocratiques ? Comment être sûrs qu’elles ne seront pas la reconnaissance des « vérités » émises par les plaignants ? La prise en compte individuelle de chaque cas ne garantit pas l’absence d’actions collectives et publiques ultérieures. Les « Voix libérées » ne sont pas toutes des plaignants.
Ne serait-ce pas aller trop vite en besogne ? Il conviendrait que les dossiers concernant cette affaire ne fussent traités qu’à l’issue des enquêtes officielles, et d’une enquête ecclésiale qui eût l’honnêteté d’entendre toutes les « voix » qui ont fait cette chorale. Qu’on le veuille ou non, cette affaire ne peut se restreindre au traitement d’individualités. Elle entre en résonance, à défaut de « raisonnance » pour l’instant, avec l’histoire de nombreux petits chanteurs qui ne peuvent se résoudre à voir leur mémoire et leur réputation bafouées. Tous ont besoin de la Vérité.
A ce jour, l’Inirr n’a apporté aucune réponse. Si, dans son principe, l’objectif de la justice restaurative est le rétablissement de la paix sociale, elle se doit normalement d’impliquer l’ensemble des membres qui font cette « société ». Sinon, de quelle justice parle-t-on ?
En octobre 2022, un troisième courrier envoyé en recommandé avec accusé de réception a conduit à cette réponse.
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