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Photo du rédacteurLe collectif du doute

Réponse à un plaignant

Peu avant son lancement, des membres du Collectif du Doute ont reçu d’un plaignant un courriel (en image ci-dessous). La réponse a tardé à venir, faute d’éléments fiables. Mais, avec du recul, il est aujourd’hui possible de voir dans cette correspondance entre des chanteurs (aux noms cachés ici), le reflet de deux démarches inconciliables, et peut-être irréconciliables. A se demander qui est victime de quoi.


Cher plaignant,


Défendre l’indéfendable ? Soutenir l’insoutenable ? Pensais-tu vraiment si bien dire ?


Ton courriel est arrivé, il est vrai, quelques jours avant la conférence de presse du 19 mars qui lança officiellement le Collectif du Doute (CDD). Bien évidemment, tu ne pouvais être informé de ses intentions et dans l’élan binaire [1] de l’air du temps, tu ne pouvais que juger négativement : pas pour, donc, contre. Normal que cette « réunion » te semble « absurde » et que nos motivations te paraissent énigmatiques. Mais, même si tu le demandes dans ton courriel, veux-tu vraiment nous comprendre ?


Avec moins d’a priori, et davantage fidèle à nos bons souvenirs, tu aurais pu, malgré tout, sans cynisme blessant, croire à notre empathie face à « l’existence ravagée de ceux qui souffrent dans leur chair ». Après ces références pathétiques, pensais-tu en rajouter encore un peu au cas où nous aurions été à ce point insensibles ? De toute évidence, la tournure des événements n’allait aider personne et ne répondrait pas à la détresse ainsi mise à nu.


Le discours aux journalistes a insisté sur un besoin : sortir d’une relation de perdants-perdants pour que, justement, la défense du défendable s’organise, à commencer par celle des plaignants dont la prise en charge médiatico-ecclésiatique relevait plus de l’instrumentalisation que de la guérison. De fait, le plus à défendre était tout simplement la vérité pour se libérer d’un passé mal déballé, d’un carcan idéologique déformant… et se relever dans une dignité commune. Le contexte médiatique, social, ecclésial… ne le permettait pas. Or, quand on veut la « Vérité », celle que tu appelles de tes vœux, il faut s’en donner les moyens.


Maintenant, avec du recul, qu’y avait-il de défendable ? Peut-être avais-tu raison.


Les éléments d’enquête ont montré, d’après les échos des avocats revenus au CDD, que tu n’as pas subi de préjudice de tes passages à l’infirmerie. Ce n’était pas si « insoutenable : « J’ai toujours vécu cela comme un examen médical, as-tu déclaré aux gendarmes dans ta déposition, je n’ai jamais eu la sensation d’être violé. Et c’est pour cela que j’ai mieux vécu cela que d’autres camarades […] Personnellement, je n’ai moins été choqué car j’ai vécu cela comme un acte médical. » Outre ta simple projection personnelle d’une intention coupable sur un « acte » proprement médical, si ta plainte avait, d’aventure, connu une suite au tribunal, elle ne t’aurait valu d’obtenir vraisemblablement qu’un euro symbolique. Rien de bien gênant puisque, précises-tu dans ton courriel : « je n’ai pas besoin d’argent ». Malgré tout, le procès canonique à peine commencé, l’INIRR t’a tout de même offert une somme substantielle en guise de dédommagement tandis que l’Abbé, malade, très âgé, s’était retrouvé démuni, fatigué, abandonné, à la rue, sans ressource, sans défense équitable… et pourtant innocent au regard des accusations proférées dans la presse.


Tout cela, il faut l’admettre, n’est pas bien défendable.


Ensuite, ta présence dans la presse, ta photo de groupe avec l’INIRR … montrent que tu as pris part à un mouvement de calomnie, un lynchage médiatique qui n’avait rien de fondé. Tu as voulu croire, malgré nos avertissements, nos doutes et nos premières analyses, à cette lame d’épuration éthique, cette vague convergente de témoignages, de plaintes qui « ne cessaient d’affluer de jour en jour », qui allaient déferler par « Dizaines » tel un raz de marée… qui a accouché d’un flop, une simple flaque d’eau qui n’a fait qu’épouser les formes des idées (idéologies ?) ambiantes dans une platitude consternante. La question de la « respectabilité » perdue que tu nous opposes ne se pose plus : Quand tu retires à un homme sa dignité, tu renonces à la tienne.


Vraiment, tout cela n’est pas défendable.


L’enquête de gendarmerie était contestable, elle l’a été, et les abus ne sont pas si « avérés ». Désolé, mais je préfère ma prudence à cette violence destinée à « salir [2] ». Certes, tu ne peux plus appeler notre directeur « l’Abbé » mais cette incapacité, finalement, ne vient pas tant de ce qu’il aurait fait que de ce que tu es, en fait, devenu. Tu as beau jeu de rappeler l’enfance quand tu sembles lui tourner le dos définitivement.


Alors, dans la foulée, tu « ne donnes pas cher » de l’éternité de Dieu. Cette petite formule de conclusion tout faite, répétée à souhait, est loin des vœux de ta Promesse. Elle fait plutôt écho à ces petites apostasies de bon ton tant prisées des médias. Même Christian Guéritault a connu son petit moment d’abjuration à la télévision [3] avant d’aller ensuite chanter « Hear O Lord » à la cathédrale. Grand moment de sincérité ! Quelle joie pour Mgr Jordy qui a tant à apprendre [4] des Voix libérées ! Votre « courage » a souvent été salué, et, après tout ce que vous avez fait, je l’avoue, je n’aurais jamais été capable d’en faire autant.


En fait, j’ai plutôt de quoi être chagriné par la valeur que tu accordes dorénavant à l’éternité divine. En considérant ainsi le Ciel, tu juges la miséricorde de Dieu sur la base des péchés des hommes, au point de faire du Paradis un ramassis de salauds irrécupérables… et donc infréquentables. Tu ne sais visiblement pas de quoi tu parles.


Cette fois encore, ta position n’est plus du tout défendable.


Là, le Collectif du Doute ne pourra plus rien pour toi. Peut-être le Paraclet... Mais, si tu veux rester à la porte du paradis, sans doute trouveras-tu dans le livre de Fabrice Hadjaj [5], Le Paradis à la porte, des raisons qui font croire à la Mané éternelle, loin du theatrum mundi dans lequel tu as voulu faire carrière. Si tu ne donnes pas cher de notre éternité, inversement, je ne miserai jamais un kopeck sur le monde d’après auquel tu participes et que tu sembles vouloir faire advenir. Dans l’Histoire, les Grands Soirs ont toujours connu des lendemains qui déchantent…


Déchanter ; un comble pour des voix libérées. Voilà qui ne sera jamais non plus défendable.


A nos bons souvenirs donc… enfin, ceux qui avaient de l’avenir.


Manécantorialement


Un petit chanteur (qui aurait pu en être plein d’autres)


[5] Fabrice Hadjadj, Le Paradis à la porte, Essai sur une joie qui dérange, Seuil, 2011, 512 p. Voir plus spécialement, page 453, le Septième Mouvement, la clé des Chants.

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