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Photo du rédacteurLe collectif du doute

Protestation romaine

 

A l’issue des résultats des différentes procédures, le Collectif du Doute s’est tourné vers le Vatican pour faire part de son indignation. Le trop plein d’irrégularités se déverse maintenant en un bilan affligeant après avoir fait couler beaucoup d’encre… à défaut de larmes. Dans un courrier adressé à la Secrétairerie d’Etat, son dernier cri d’alarme est un appel à la responsabilité évangélique. Sera-t-elle prise ?



Son Eminence le Cardinal PAROLIN

Secrétairerie d’État

00120 CITE DU VATICAN

 




 

Monsieur le Cardinal,


Permettez-nous de faire appel à votre sollicitude en ouvrant dans cette présente un épineux dossier qui concerne le sort injuste réservé au Père Bernard TARTU dans le diocèse de Tours (France) et ses fâcheuses retombées sur l’Église catholique.


Vous n’êtes certainement pas sans ignorer les « vagues » de dénonciations qui ont submergé les médias français et internationaux. Ce phénomène communément appelé #MeToo, qui a poussé de nombreuses personnes se considérant victimes à dénoncer publiquement leur agresseur, a trouvé son écho au sein de l’Église. La mise à jour de nombreux abus sexuels a fait l’effet cette fois d’un tsunami dont le rapport SAUVE a pu, à sa manière, en mesurer l’ampleur.


Cette déferlante a aussi emporté sur son passage l’Église Tourangelle. D’anciens Petits Chanteurs de Touraine (Manécanterie du diocèse de TOURS) au nombre de 7, se plaignant d’abus dont ils auraient fait l’objet 30 à 40 ans plus tôt, se sont proclamés victimes du Père Tartu,  fondateur et directeur de la manécanterie, et ont constitué le « collectif des Voix libérées », voix qui ont surtout eu la voie libre dans ce contexte médiatique demandeur et porteur d’indignation. Jusqu’alors, en 60 ans, le Père Tartu n’avait été mis en cause par aucune plainte, aucune rumeur, ni même aucun fait pouvant évoquer un abus.


Au regard des dissonances qu’ils faisaient entendre aux oreilles des plus averties, des doutes sont rapidement venus. D’autres petits chanteurs se sont rassemblés autour des invraisemblances dans les déclarations, des incohérences historiques, de l’ampleur disproportionnée de l’affaire, des résonnances idéologiques… pour naturellement former le « Collectif du Doute » avec pour objectif de travailler à la recherche de solutions justes et apaisées.


Mais, face aux injustices à répétition, après environ deux années passées à informer les quelques 950 anciens petits chanteurs et autres amis de la Manécanterie, à veiller à notre mémoire, à analyser, à prendre du recul…, le Collectif du Doute est aujourd’hui acculé à devoir en dernier recours faire appel à votre bienveillance et à poser une simple question d’espérance : au  diocèse de Tours, et par extension dans le monde catholique, est-il encore possible de faire Église aujourd’hui ?


Loin de vouloir provoquer, la question se pose malheureusement à tout croyant face à l’histoire des abus du collectif des Voix libérées qui a défrayé la chronique Tourangelle. Pour le collectif du Doute, que nous représentons, elle s’impose plus que jamais comme une alarme ultime abandonnée après deux ans à jouer le rôle de lanceurs d’alerte.


 Le Peuple de Dieu a appris à faire corps dans un agir commun, une « liturgie ». Chaque pêcheur y trouvait donc sa place, et par miséricorde y recevait ses grâces, à l’instar de la femme adultère, jamais condamnée, toujours relevée, sauvé du regard assassin des autres sans être jugée, sauvée de sa propre misère sans que rien ne la heurte : elle qui n’a jamais connu la première pierre. Dans la communion de l’Esprit Saint, ce corps appelé à la liberté montrait le visage rayonnant d’un Homme révélé en trois mots :


Le Chemin, la Vérité et la Vie.


Mais un nouveau crédo est arrivé : « Toute victime autoproclamée est dans le vrai », indubitablement. Les accusations ont alors fusé en Touraine et le charme de l’émotion collective a opéré. La magie performative a alors propulsé un prêtre innocent au cœur d’une tourmente médiatique sans précédent. Calomnie, dénonciation, diffamation, témoignages infondés ont façonné, aux yeux de tous, le portrait d’un monstre : un bouc émissaire chargé du scandale à extirper. Sans prudence, ni retenue, beaucoup de fidèles se sont conformés, à distance, aux élans "techno-compassionnels" en réseaux [1], indignés des nouvelles diffusées, assoiffés de condamnation sans rien connaitre du condamné, des faits reprochés, et du contexte. La sidération sans considération a alors validé la haine. Dans l’empathie sélective du moment, la majorité tant humaine a fait corps avec l’esprit du monde dévoilant la face plus sombre d’un narcisse reflétée en trois mots :


Le parcours personnel, la sincérité et le vécu.


Nous avons alors vu avec une profonde consternation l’institution ecclésiale accompagner la mise en scène des victimes autoproclamées et condamner un homme, qui crie encore son innocence, par simple conformisme, sans preuve ni argument. Malgré nos alertes, nos demandes de rencontres, la transmission de courriels révélateurs de la violence et des menaces physiques des Voix libérées…, nous l’avons vue privilégier les accusateurs, les recevoir, les accueillir et leur faire tenir le haut du pavé… et elle a appelé cela de l’écoute.


Sans aucun contradictoire, sans procédure ni enquête, nous l’avons vue désigner un coupable, le mettre à l’écart, l’isoler… Nous l’avons vue maltraiter son serviteur, le laisser démuni, sans ressource, malade, âgé… et elle a appelé cela une mesure d’éloignement.


Nous l’avons entendue tordre l’histoire des Petits Chanteurs de Touraine, notre histoire, salir la réputation de notre collectif sans qu’aucun fidèle ne bronche, sans qu’aucun prêtre ne se positionne, dans un silence effroyable… et elle a appelé cela la fin de l’omerta.


Sans aucun discernement, « parce qu’il y a trop de faisceaux concordants », l’archevêque a impitoyablement condamné sans preuve, sans jamais recevoir l’intéressé ni s’entretenir avec lui, refusant tout élément contradictoire, refusant toute enquête… pour ensuite prononcer une suspens a divinis abusive, invalide au regard du droit canon, lui interdisant tous actes de son ministère, le « rayer des listes » ; sanction la plus lourde pour une conviction des plus légères… et elle a prétendu qu’il s’agissait d’une mesure conservatoire.


Nous l’avons vue laisser raconter des abus sans cohérence ni fondement, sans vérification, sans attendre les conclusions du tribunal… et l’on a appelé cela de la présomption de vraisemblance ;


Vue rassembler les fidèles le 19 mars 2023 à la messe épiscopale à la cathédrale de Tours pour y déverser à la suite de l’archevêque un flot de calomnies, ruiner publiquement la dignité d’un homme qualifié de « pédocriminel » au cours de l’homélie, poser officiellement aux côtés des Voix libérées pour toute la presse locale sur le parvis de la cathédrale… et l’on a appelé ça une célébration mémorielle ; Le Saint Père a-t-il institué la Journée de prière pour les personnes victimes de violences, d’agressions sexuelles et d'abus de pouvoir et de conscience au sein de l'Église dans cet esprit-là ? ;


Vue indemniser les plaignants avec les finances de la Conférence des évêques de France (le SELAM mis à disposition de l’INIRR), sans attendre l’issue de la procédure du tribunal canonique, présumant de la condamnation… et l’on a appelé cela une réparation ; N’était-ce pas plutôt une façon d’acheter le silence des Voix libérées ? ;


Vue laisser une poignée de plaignants sans scrupule déverser leur violence verbale par courriels, dans la presse, et même pendant cette messe du 19 mars 2023… et l’on a appelé cela de la reconnaissance.


Nous l’avons vue instruire l’affaire au nouveau Tribunal pénal canonique national (TPCN), jouant d’influence pour éviter d’être désavouée. Au terme de sa plaidoirie, dont nous savons qu’elle fut jugée « brillante », décortiquant toutes les pièces du dossier pour les confronter au droit canonique romain, l’avocat ecclésial de l’accusé a démontré l’innocence du mis en cause. Malgré les nombreux doutes et interrogations relevés par le tribunal lui-même, la culpabilité a finalement été retenue. Le recours très motivé mettant en exergue les nombreuses contradictions du tribunal a été écarté sans la moindre motivation, le tribunal se montrant dans l’incapacité d’y répondre. Face à ce constat, l’accusé a fini par renoncer. Lorsque la règle de droit n’est plus respectée, la protection du justiciable n’est plus assurée, laissant place à l’arbitraire. Comment pourrait-on appeler justice une telle dérive ?


Dans cette affaire, l’archevêque de Tours nous est apparu s’ériger en juridiction de jugement. Ne s’est-il pas estimé intouchable, pariant que personne n’oserait s’opposer à lui et à ses décisions arbitraires ? Loin de jeter la première pierre, Monseigneur Jordy n’a-t-il pas tout simplement orchestré une « lapidation », depuis son diocèse de Tours jusqu’à la conférence des évêques de France qu’il co-préside ?


Visiblement, le « nouveau crédo » s’est incarné. Il a façonné un corps peu secourable pour les futurs lapidés, pour les victimes de l’arbitraire, pour les âmes perdues par leurs déviances calomnieuses, pour les êtres révoltés en partance, les désespérés, les fidèles en sursis, les abusés désabusés,… et les désemparés du Collectif du Doute. A vouloir faire ainsi bonne figure, l’Église ne commencerait-elle pas à dessiner en trois mots les contours d’une face peu reluisante :


L’errance, le mensonge et la mort ?


Dénoncés depuis plus de deux ans, les abus du prélat ne seront certainement jamais sanctionnés. Il faut aujourd’hui s’y résigner. Mais le pire serait que cette affaire du diocèse de Tours serve de support de communication pour faire figure d’exemplarité dans l’Église de France.


S’il est indispensable de sanctionner les comportements déviants au sein de l’Église catholique, un discernement juste et équitable ne devrait-il pas prévaloir lorsque les accusés crient leur innocence ? L’institution ne devrait-elle pas alors servir de rempart contre la vox populi et les assauts de l’esprit du monde ? En l’absence d’un véritable procès dans le respect du droit, personne ne mesure l’impact individuel sur les chrétiens concernés de près ou de loin par cette affaire.


Nous avions accueilli favorablement la création du TPCN, séduit par l’idée de délocaliser les affaires afin de libérer le tribunal des influences locales et lui garantir une parfaite indépendance. Mais derrière cette façade louable, à l’aune de notre affaire, comment ne pas y voir un instrument de pouvoir au service du Vice-Président de la Conférence des évêques de France ? Ne pourrait-il pas l’être pour d’autres membres de cette conférence en d’autres dossiers et circonstances ?


Dans ces conditions, comment peut-on encore faire Église ? Quel fidèle digne de ce nom pourrait y adhérer ? En abandonnant le droit, l’apport civilisationnel de la religion catholique, en jetant la suspicion sur nombre de fidèles, tous bourreaux potentiels, en posant l’épée de Damoclès au-dessus des plus exposés à la merci de n’importe quelle dénonciation, l’Église se fourvoie. Quelle unité peut-elle encore espérer ? Sur quel principe ?


Ses lâches concessions à tous ces abolissements serviles contemporains la font apparaître à nos yeux comme un sépulcre blanchi (Mathieu 23:27) qui ne brillera jamais au soleil de Justice (Malachie 4:2). A quoi, donc, par une réponse en actes, l’institution veut-elle maintenant rendre témoignage ?


Rien dans ce courrier n’est proféré à la légère. Tout a été amplement, soigneusement et factuellement développé, point par point, sur le site du Collectif du Doute dans le respect de chacun : https://www.lecollectifdudoute.fr/blog . A chaque fidèle, maintenant, le courage de se regarder dans le miroir de cette institution et de prendre ses responsabilités. Le reste n’est plus notre affaire.


Avec des cœurs blessés, profondément tristes et animés par une profonde déception, daignez, Votre Éminence, agréer l’expression de notre très profond respect.



                                                                              Les membres du Collectif du Doute 

 


NB : Faudra-t-il, après avoir diffusé cette lettre sur notre site pour nos lecteurs et membres, en informer les évêques de France ?


NOTE


[1] Cf. Fabrice Hadjadj, Des loups déguisés en agneaux – Penser les abus dans l’Eglise, Cerf, 192 pages, Janvier 2024.  Christophe Mory,  Culture Club, Radio Notre Dame, 25 janvier 2024.

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